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Les risques des régimes dérogatoires de gestion des fonds publics en Afrique : le cas de la lutte contre le Covid-19

11/27/2021

4 Commentaires

 
Foussénou Sissoko
 
Pour répondre à la crise sanitaire liée au Covid-19, la majorité de gouvernements africains ont mis en place des régimes de passation de marchés d’urgence. Mais ces solutions ne vont pas sans risques. Dans ce billet de blog, nous évoquons quelques-uns des cas de fraude documentés et suggérons une activité pour la future communauté de pratique qui se penchera sur la corruption en santé.
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Pour répondre à la crise d’urgence de santé publique née de la pandémie à Covid-19, de nombreux gouvernements africains ont été contraints de modifier temporairement leurs propres règles de passation de marchés publics pour l’achat de travaux, de biens et services. Ils se sont inscrits dans la logique de passation de  marchés publics  d’urgence  ou  régime  de  droit  dérogatoire (voir le moniteur mis en place par CABRI). Le revers de cette option est que, pour certains gouvernements dont la gestion des fonds Covid-19 a été auditée, de nombreuses fautes de gestion, des irrégularités financières et des infractions à la loi et aux règles de la concurrence ont été constatées.  C’est le cas notamment au Cameroun, au Mali et au Maroc.

Cadre règlementaire des régimes de droit dérogatoire au Cameroun, Mali et Maroc

Le Cameroun, le Mali et le Maroc appliquent chacun un régime de droit dérogatoire comme mécanisme d’ajustement apporté à l’achat des services et produits de santé anti-Covid-19, un régime encadré par des circulaires ou des décrets.

Au Cameroun, les marchés passés dans le cadre du plan national de riposte au Covid-19 sont soumis à un régime de droit dérogatoire qui autorise les contrats spéciaux et les exonérations de taxes sur les achats d’équipements pour faire face à la pandémie du Covid-19. Ce régime a été fixé par une correspondance du ministre secrétaire général à la présidence de la République adressée le 7 avril 2020 au ministre de la santé publique. Le Président de la République autorise « la passation des marchés spéciaux en vue de l’acquisition des équipements, des consommables et la réalisation des prestations ».
 
Au Mali, le  Décret  N°2020-0276/P-RM du 16 juin 2020 fixe les régimes de marchés publics relatifs aux mesures de prévention et de riposte contre la  maladie à Covid-19. Au chapitre 2 de ce décret, article 5.1, il est écrit : « les marchés du présent décret ne sont pas soumis au contrôle a priori de la Direction générale des marchés publics et des délégations de services publics
».

Le gouvernement marocain quant à lui a assoupli les procédures de passation de marchés publics pour permettre la mise en œuvre de consultations urgentes dans des délais compatibles avec les contraintes découlant de la situation d'état d'urgence sanitaire à travers les circulaires du 31 mars et du 2 avril 2020 du ministère des finances.. La Circulaire du 2 avril 2020 prévoit que « pendant toute la durée de l'Etat d'Urgence Sanitaire, les titulaires de marchés passés avec l'Etat ou les collectivités territoriales n'auront pas l'obligation de produire des factures signées par voie électronique ».

La porte ouverte aux abus


Différents rapports d’audit et rapports parlementaires des mois de mai et juillet 2021 ont relevé les effets  pervers  de  ces régimes  dérogatoires : nombreuses  infractions à la loi et aux règles de passation de marchés et des  marchés  gagnés par  des  entreprises non homologuées  par  l’Etat et sans expertise.  Au Maroc, les medias ont rapporté le rapport critique de la mission parlementaire sur la question. Au  Mali, c'est Le  Bureau  du  Vérificateur Général qui a relevé des irrégularités financières dans  la  passation  des  marchés Covid-19. Et au Cameroun, c'est la Chambre des Comptes de la Cour Suprême qui a mis en  évidence de nombreuses  fautes de gestion commises par des cadres du ministère de la santé, ainsi que des irrégularités  dans  les  procédures de passation de marché.

Pour  réduire les infractions lors des passations de  marché  et pour faire face aux allégations de corruption des achats et de la  fourniture de services de soins Covid-19, les ministères des finances dans un certain nombre de pays ont apporté des correctifs, par le renforcement de la transparence et de la redevabilité. C’est le cas au Sénégal, où les pouvoirs adjudicateurs  sont  invités sous  la  surveillance des Gestionnaires des Finances  Publiques et le contrôle de l’Agence de Régulation des Marchés à rendre compte des actions et des processus de passation des marchés. Schémas identique en Afrique du Sud, qui a instauré le  suivi régulier et la surveillance des dépenses et la production des rapports de dépenses. Ce mécanisme de suivi est élargi aux  achats publics des vaccins Covid-19 à travers le ministère de la santé qui assure le suivi des dépenses, le contrôle, et  qui veille  enfin à l’amélioration du  rapport qualité-prix.


Des pistes d'action

La cinquième conférence du collaboratif de Montreux nous a rappelé que la gestion des finances publiques est un enjeu qui doit être bien plus sur le radar des experts de santé publique. Dans un récent webinaire, nous avons entendu que les experts du FMI annoncent des temps difficiles pour les finances publiques dans nos pays. Les ressources étaient déjà rares, elles risquent de l’être encore plus. Comme experts, nous pouvons servir de vigies quant à leur bon usage. Il pourrait aussi être intéressant de faire une large documentation sur l’ensemble des pays africains. Nous pourrions notamment analyser les rapports d'audit des institutions en charge de superviser la bonne gouvernance financière des dépenses COVID et la couverture de ces rapports dans les média nationaux. Il a été annoncé qu’une communauté de pratique consacrée à la corruption dans le secteur de la santé va être lancée. Une telle documentation multi-pays ne constituerait-elle pas un beau projet collaboratif pour ses membres ? 

4 Commentaires
Bruno Meessen
12/7/2021 10:32:14 am

Merci Foussenou, j'aime bien cette idée de documenter comment les systèmes institutionnels nationaux ont répondu. Il y a en effet les instances en charge du contrôle interne à l’Etat et les commissions parlementaires, mais il y a aussi l’appareil judiciaire. A noter que des risques ont été pris dans tous les pays et que les situations problématiques seront universelles. Voici ce que j’ai trouvé ce matin dans la presse belge.
https://www.lalibre.be/belgique/judiciaire/2021/12/07/le-gouvernement-federal-escroque-lors-de-lachat-de-millions-de-masques-4-personnes-soupconnees-UYFKFEAQ75CMJG6B4UMLRATYRI/

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BAGAYOKO Moussa link
12/7/2021 12:12:37 pm

Bonjour Mr SISSOKO pour cet éclairage qui n'est guère surprenant. Je pense qu'au delà de cette situation fruit de l'improvisation, des efforts doivent être fait pour rendre disponible des dispositions pour les achats d'urgence en cas d'épidémie avec des mesures pour réduire ces cas de fraudes. Même si nous étions avec les procédures classiques, les risques de corruption existent aussi. Bon courage

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Alexandre Nimubona
12/7/2021 12:44:59 pm

Merci cher Foussénou pour ce billet de blog qui touche un aspect très sensible de la culture africaine : la corruption.

Le contrôle de la corruption comme expression de bonne gouvernance paraît tabou dans multiples contextes africains où elle est perçue comme expression de solidarité. Il y a donc un grand travail à faire à ce point. J’imagine aussi que cette voie de conscientisation des acteurs est meilleure pour atténuer cette affection dans les systèmes de santé. La corruption est mortelle. Vous l’avez appélé maladie virale de la mauvaise gouvernance ! Permettez-moi aussi de la qualifier de maladie cancéreuse des systèmes de santé.


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Hyacinthe Kankeu
12/10/2021 05:32:11 pm

Merci Foussénou d'aborder ce sujet d'actualité qui nous interpelle à plus d'un titre.

Le cas du Cameroun évoqué dans ce billet de blog a fait couler beaucoup d'encre et de salive tant dans les médias classiques que sur les réseaux sociaux, avec un fort échos chez les acteurs politiques et ceux de la société civile.
Je trouve intéressante l'idée d'élargir à d'autres pays africains (et même d'autres continents) la documentation de ces régimes dérogatoires qui ont été adoptés pour réagir à la crise sanitaire, des abus qui ont été révélés, ainsi que des mécanismes mis en place pour les limiter. Mieux, il serait utile de recenser également les suites (judiciaires, politiques, etc.) qui ont été réservées aux situations où des irrégularités ont été formellement constatées, car la sanction est un instrument nécessaire pour combattre la corruption.

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