Dans ce blog, Divine Ikenwilo commente la récente Déclaration d'engagement par le Parlement Panafricain. Il partage ses doutes sur l'impact de telles déclarations.
On se souviendra de l'année 2011, peut-être, comme l'année dans laquelle la lutte contre la mortalité et la morbidité maternelle et infantile a reçu pour la première fois le soutien des parlementaires africains. Suite à la troisième Conférence des Présidents des Parlements Africains tenue à Johannesburg (17-18 Octobre 2011), les Présidents des chambres de députés et des sénats d'Afrique ont "unanimement adopté une résolution historique sur la déclaration d'engagement à prioriser le soutien du parlement pour l’augmentation de l'action politique et du budget destiné à la santé maternelle, néonatale et infantile en Afrique". Entre autres choses il est attendu que cet engagement, salué comme le premier du genre menée par les Présidents des parlements en Afrique, améliore le soutient politique à accorder la priorité à la politique et financement des soins pour les mères et leurs enfants.
Il est peut-être juste de penser que cet engagement était nécessaire face à la preuve continue de la position du continent (vis-à-vis des autres continents) dans la réalisation des objectifs de santé maternelle et infantile établis sous les Objectifs du Millénaire 4 et 5 . Par exemple, malgré les progrès réalisés au cours des onze dernières années, la mortalité des enfants de moins de cinq ans et les taux de décès maternel en Afrique sub-saharienne sont les plus élevés au monde et toujours au-dessus du taux cible des OMD. Tout effort visant à les réduire (eux et beaucoup d'autres problèmes de santé connexes) prendra un long chemin, non seulement dans la réalisation des cibles des OMD, mais aussi dans l’amélioration de la vie et du bien-être général des peuple de l'Afrique subsaharienne (ASS).
Sur un continent où la majorité du financement des soins de santé provient des sources privées, souvent avec des conséquences catastrophiques particulièrement pour les pauvres et les plus vulnérables, une augmentation de la proportion des dépenses du gouvernement sur la santé pourrait, toutes choses étant égales par ailleurs, laisser espérer l’amélioration de l'accès universel aux soins de santé vitaux comme ceux de la santé maternelle et infantile. L'engagement des présidents des parlements vient également avec des objectifs spécifiques d’augmenter l'allocation des dépenses publiques de santé à divers niveaux (et dans la plupart des cas, en ciblant les 15% convenus à la Déclaration d'Abuja en 2001). Les objectifs spécifiques par pays signifient aussi que les décideurs, les chercheurs et les autres observateurs pourront suivre le progrès vers les objectifs.
Dans une argumentation en faveur de l’intervention continue du gouvernement dans la production des biens et services, l’économiste John Kenneth Galbraith disait « dans l'évolution des économies, les choses qui pouvaient être produites et vendues à un prix ont été reprises par les producteurs privés. Celles pour lesquelles ce n’étaient pas le cas, mais qui en fin de compte n’étaient pas moins urgentes sont restées à charge de l’Etat." Bien que le secteur privé soit capable de jouer un rôle actif dans la prestation des soins de santé, le rôle du gouvernement ressort consolidé de l’effort contemporain en faveur d’une couverture universelle des services de soins de santé pour répondre aux besoins des plus vulnérables et ainsi améliorer l'équité.
Malgré l'augmentation potentielle des dépenses publiques après la déclaration des présidents des parlements, il existe toutefois de la preuve scientifique que l’augmentation des dépenses publiques de santé ne bénéficie pas nécessairement aux plus pauvres (Castro-Leal et al., 2000). De même, malgré l'abolition des frais d’accès aux services de santé, la protection financière reste non-atteinte, tout comme les paiements directs des usagers demeurent élevés chez les pauvres (Nabyonga-Orem et al. 2011). L'incapacité d'atteindre l'objectif des déclarations de gratuité est largement attribuable à une consultation inadéquate des acteurs, à une précipitation politique et à un manque de préparation adéquate (Meessen et al. 2011). Cela fait maintenant plus de 10 ans que les chefs de gouvernement africains se sont engagés à accroître les dépenses publiques de santé à 15% de leur budget national. Les critiques diraient que la plupart des pays ont difficilement atteint cet objectif de 15% tandis que les parlementaires s'engagent à plus de promesses.
À la lumière de ce qui précède, l'impact de la déclaration des présidents des parlements sur les progrès en cours en matière de la santé maternelle et infantile sur le continent demeure par conséquent douteux. Pour l'instant, c'est juste une déclaration d'intention, et il n'y a rien d’obligatoire dans cet engagement. Il n'y a guère de continuité au niveau des gouvernements et parlements sur le continent, ce qui signifie que les nouveaux gouvernements et parlements changent habituellement tout, toute déclaration, toute politique, toute promesse. Par conséquent, il serait utile de traduire la déclaration des parlements en exercice (et toute autre déclaration similaire) en lois (si possible) pour qu'elles engagent les gouvernements en exercice et futurs.
En somme, la question qui me reste à l’esprit est de savoir si cette déclaration est motivée par opportunisme politique ou si effectivement, nous devons y voir une source d'espoir pour le continent. Il appartient maintenant aux parlementaires de travailler avec leurs gouvernements respectifs et les ministères concernés (par exemple, de la Santé, des Finances et de la Planification Economique qui en fait planifient pour les services des soins de santé) pour faire la différence, non seulement en matière de santé maternelle et infantile, mais aussi pour la santé de l'ensemble de la population de notre cher continent.
Traduit de l’Anglais par Emmanuel Ngabire, ESP/Kigali